Le Sous-Lieutenant Albert Nicolas PIERROT

Le 26 aout 2013, la mairie d’Olizy a pris une décision émouvante et significative en choisissant de rendre hommage au sous-lieutenant Albert Nicolas Pierrot, un véritable héros de guerre originaire de la région. La décision de baptiser une place à son nom, la « Place du Sous-Lieutenant Albert Nicolas Pierrot, » est une démarche profondément respectueuse et symbolique qui vise à perpétuer la mémoire de cet homme.

Albert Nicolas Pierrot, né à Olizy le 12 février 1873, est un enfant du village qui a fait preuve d’un courage exemplaire pendant la Première Guerre mondiale. Son engagement au sein de l’armée, sa blessure grave lors de la bataille des frontières en 1914, sa promotion au grade de sous-lieutenant, et sa participation héroïque à la conquête de la colline des Eparges en 1915 sont autant d’actes de bravoure qui méritent d’être commémorés.

Cette démarche témoigne de la gratitude et du respect profonds de la municipalité envers son citoyen exemplaire, qui incarne l’esprit de sacrifice et de dévouement pour la nation.


Nous vous proposons cet article en hommage au sous-lieutenant Albert Nicolas Pierrot:

Le 26 août 2023, M. Daniel Pierrot, un vétéran de l’armée de terre avec 38 années de service, a partagé avec nous l’histoire remarquable de son grand-oncle, le sous-lieutenant Albert Nicolas Pierrot :

Né le 12 février 1873 à Olizy où il passera son enfance et son adolescence, Albert Pierrot a grandi au sein d’une famille de quatre enfants dont il est l’ainé, sous les soins d’Edouard et d’Anne-Marie ses parents. Son parcours l’a conduit à embrasser la carrière militaire, lorsqu’il s’est engagé au 132ème RI le 30 mars 1894. En 1902, il a uni sa destinée à Blanche Martin, originaire de Mourmelon, bien que leur union n’ait pas donné naissance à des enfants. Ils ont élu domicile à Reims, puis à Mourmelon-le-Grand, rêvant de vivre une vie paisible ensemble.

Cependant, au cours de la première décennie des années 1900, la vie d’Albert a été marquée par la perte de sa sœur Marthe, décédée à un jeune âge, ainsi que de sa mère Anne-Marie en 1911, à l’âge de 60 ans.

En 1910, Albert a été muté au 106ème RI, où il a atteint le grade d’adjudant-chef. La déclaration de la Première Guerre mondiale a vu son bataillon quitter le camp de Mourmelon le 3 août 1914, se dirigeant vers Bannoncourt, puis Chaillon, situés au nord-est de Saint-Mihiel. C’est là que commence son voyage à travers ce terrible conflit, qui allait durer sept longs mois, jusqu’à la fin de la guerre en 1918.

Les premiers combats furent accompagnés de souffrances, et Albert a été gravement blessé à Arrancy-sur-Crusnes le 22 août 1914, lors de la bataille des frontières, une balle perforant sa jambe droite. Quatre jours plus tard, il apprit avec douleur que son village natal, Olizy, avait été pillé et incendié, causant la mort de 15 civils, dont Jules Collignon, le père de Mathilde Pierrot, sa belle-sœur. Après sa récupération, Albert rejoignit sa compagnie, la 5ème, et fut nommé sous-lieutenant, prenant le commandement d’une section d’infanterie composée d’environ trente hommes.

Vers la fin d’octobre 1914, le 106ème RI se retrouva dans la région des Eparges, où Albert côtoya régulièrement le sous-lieutenant Genevoix, également chef de section dans la 7ème compagnie. Une amitié solide se forma entre eux alors qu’ils partageaient les tranchées des côtes de Meuse, de la Calonne aux Eparges. L’histoire d’Albert est immortalisée dans le livre de Genevoix, « Ceux de 14 », sous le pseudonyme de sous-lieutenant Jeannot.

Le 17 février 1915, l’État-Major décida de lancer la première attaque française pour conquérir la colline des Eparges. Tôt ce matin-là, le bataillon Marchal, auquel Albert appartenait, quitta les tranchées de Calonne pour se rendre aux Eparges à l’aube. Le temps était magnifique ce jour-là, presque printanier, comme décrit dans le livre. Les compagnies atteignirent rapidement la cuvette 280, au pied de la crête, sans être repérées par l’ennemi. Après l’explosion des mines françaises et les tirs d’artillerie, les fantassins s’élancèrent vers le sommet.

La section d’une trentaine d’hommes, dirigée par Albert Pierrot, avec baïonnettes au canon, progressa rapidement vers les entonnoirs formés par les explosions des mines, occupant la crête des Eparges. Les premiers prisonniers allemands dévalèrent les pentes, exprimant leur soulagement d’avoir survécu. Cependant, la pénurie d’obus de gros calibres dans l’artillerie française était un défi, et parfois, leurs tirs trop courts causaient des pertes parmi les fantassins en première ligne.

À la nuit tombée, l’artillerie allemande, équipée d’obus de gros calibres, entra en action et frappa la crête des Eparges et le village. Les hommes du 106ème RI, y compris la section d’Albert Pierrot, se retrouvèrent pris au piège. Malgré cela, ils firent preuve d’une endurance physique et morale remarquable sous le feu ennemi, cherchant à renforcer la position qu’ils venaient de conquérir. Pendant six heures, de 17h à 23h, ils endurèrent un tir d’artillerie ennemie d’une puissance dévastatrice. Ensuite, un calme étrange enveloppa la colline et ses environs.

Épuisées et ayant perdu presque tous leurs officiers ainsi qu’un tiers de leurs effectifs, les deux compagnies de tête ne purent résister à la contre-attaque allemande le 18 février au matin et durent se replier sur leurs positions initiales. Plus tard, le médecin auxiliaire Henri Blauvac s’approcha de Maurice Genevoix pour lui faire part des pertes : « La 5ème compagnie s’est bien défendue. Ah ! si nos canons avaient tiré !… Mundwiller n’est pas revenu ; Rohr non plus ; Pierrot a pu être ramené sur un brancard. »

Les trois officiers de la 5ème compagnie, qui étaient inséparables dans la vie avant cet assaut, le restèrent également dans la mort. Maurice Genevoix les évoqua ainsi dans son livre : « Nous les aimions bien tous les trois amis de la 5, « Pierrot, Mundwiller et Rohr », un seul nom pour eux trois, que nous nommions toujours ensemble… » Albert Pierrot fut évacué vers l’hôpital militaire de Verdun, avec une colonne vertébrale fracturée par un éclat d’obus. Les corps de ses deux camarades officiers ne furent jamais retrouvés. Il reçut la croix de guerre avec palme pour sa bravoure et la citation suivante dans l’ordre de l’armée : « a été blessé grièvement en conduisant bravement sa section à l’assaut d’un retranchement ennemi. » Albert Pierrot fut décoré de la Légion d’honneur sur son lit d’hôpital le 22 février 1915 et succomba à ses blessures dans d’atroces souffrances le 3 mars 1915, à l’âge de 42 ans.

Ce héros de la Grande Guerre repose aujourd’hui aux côtés de son épouse dans l’allée centrale du cimetière civil de Mourmelon-le-Grand. Maurice Genevoix, auteur de « Ceux de 14 », s’est éteint le 8 septembre 1980. Il est entré au Panthéon le 11 novembre 2020, en compagnie de « ceux de 14 », ses frères d’armes du 106ème régiment d’infanterie.

Le Sous-Lieutenant

Albert Nicolas PIERROT

1 réflexion sur “Le Sous-Lieutenant Albert Nicolas PIERROT”

  1. Pierrot Daniel.

    Une seule remarque : le Sous-lieutenant Albert Pierrot commandait une section d’une trentaine d’hommes lors de l’assaut aux Eparges et non pas la 5°compagnie. La compagnie était commandée par un Capitaine.

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